Appel pour renouvellement du mandat de Rapporteur Spécial sur la situation des droits de l’homme en Érythrée

Aux Représentants Permanents des Etats membres du Conseil des droits de l’homme de l’ONU

31 Mai 2013

 

RE: Renouvellement du mandat de Rapporteur Spécial sur la situation des droits de l’homme en Érythrée

Monsieur l’Ambassadeur,

Nous vous écrivons pour demander aux membres du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, à l’occasion de sa 23ème session, de prolonger le mandat de Rapporteur Spécial sur la situation des droits de l’homme en Érythrée, afin de répondre à la situation dramatique de violations généralisées et systématiques des droits de l’homme en Érythrée, ainsi qu’à la réticence du gouvernement érythréen de collaborer avec les mécanismes des droits de l’homme au niveau régional autant qu’au niveau international.

Nous saluons avec appréciation l’adoption par consensus de la résolution A/HRC/RES/20/20 sur la situation des droits de l’homme en Erythrée lors de la 20ème session du Conseil des droits de l’homme en juillet 2012, sur proposition du Nigeria, de Djibouti et de la Somalie. La Rapporteuse Spéciale des Nations Unies sur l’Érythrée, dont le mandat a été établi par la résolution de juillet 2012 présentera un rapport mettant en lumière la situation des droits de l’homme en Erythrée en Juin 2013.

Dans son report, la Rapporteuse Spéciale dénonce la situation consternante des droits de l’homme en Érythrée, qui, d’une manière ou d’une autre, concerne la grande majorité des familles érythréennes et souligne qu’un changement substantiel ne pourrait être atteint que par un processus de réformes fondamentales, replaçant la culture actuelle de refus des droit par un régime de lois soutenant le respect pour et la réalisation de tous les droits de l’homme. De plus, la détentrice de mandat exprime son inquiétude à propos des exécutions extrajudiciaires ; de la politique de « tirer pour tuer » ;  des disparations forcées et détentions non informées ; des détentions et arrestations arbitraires ;  des pratiques généralisées de tortures physiques et psychologiques, au cours des interrogatoires policiers, militaires et par les forces de sécurité ; des conditions inhumaines dans les prisons ; du service national obligatoire et d’une durée prolongée et indéterminée ; du manque de respect pour les libertés civiles, y compris la liberté d’expression et d’opinion, la liberté d’assemblée, de convictions religieuses ; de la discrimination contre les femmes ainsi que de la violence sexuelle et basée sur le genre ; des violations des droits de l’enfant, y compris la conscription militaire et des conséquences profondes de  celle-ci  sur l’éducation ; ainsi que des conditions de vie précaires. La Rapporteuse Spéciale a également noté que ces formes multiples de violations des droits de l’homme sont parmi les raisons qui motivent de grands nombres d’Érythréens à traverser les frontières des pays voisins pour y trouver refuge.

En outre, il y a plusieurs centaines de prisonniers politiques, détenus de façon arbitraire, qui attendent depuis plus de dix ans leurs accusations et leurs procès juridiques. Parmi eux, quelques centaines ont été détenus pour plus de vingt ans sans avoir été officiellement accusés ou sans avoir été présentés à une court. Les officiels autant que les journalistes indépendants arrêtés en Septembre 2001 demeurent toujours en détention secrète ou sont décédés depuis. De même, des milliers d’Érythréens ont été arrêtés et détenus sans charge juridique pendant plusieurs années tout simplement pour avoir critiqué le gouvernement, pratiqué une religion non-reconnue par l’état, ou bien suite à leur refus de se soumettre au service national indéterminé qui est imposé à tout citoyen érythréen à l’âge de plus de 18 ans.   Le service national est obligatoire et souvent prolongé pour une durée indéterminée, ce qui mène à un système de travail forcé. Des enfants sont obligés de passer leur dernière année scolaire dans un camp d’éducation militaire, ce qui constitue, finalement, la conscription des enfants à l’armée. Des milliers d’Érythréens ont été arrêtés et détenus pour avoir tenté de s’évader ou bien de déserter le service national, par exemple en essayant de s’enfuir du pays.  L’usage des pratiques de torture est répandu. De plus, les conditions dans les centres de détention sont misérables et constituent, en tant que telles, un traitement cruel, inhumain ou dégradant. Aucune organisation de la société civile n’a obtenu la permission de travailler dans le pays et il n’existe plus de médias nationaux indépendants depuis 2001.

Au niveau régional, le cas de l’Erythrée a été soulevé à plusieurs reprises à la Commission Africaine des Droits Humains et des Peuples qui a adopté en 2005 une résolution condamnant les violations des droits de l’homme en Erythrée. Dans deux décisions distinctes en 2003 et 2007, la Commission a également constaté que le gouvernement viole les droits fondamentaux contenus dans la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et a exigé que des autorités gouvernementales détenues au secret depuis Septembre 2001 soient libérées (250/02 Liesbeth Zegveld et Mussie Ephrem contre l’Erythrée) et qu’au moins 18 journalistes qui ont  été également détenu au secret aient accès à leurs avocats (275/03 Article 19 contre l’Erythrée). Bien que ces décisions aient été adoptées par l’Union Africaine, à ce jour l’Érythrée n’a fourni aucune réponse concrète ou agi pour les mettre en œuvre.

Excellence,

Nous vous appelons ainsi à  soutenir l’adoption d’une résolution au Conseil des droits de l’homme qui :

  • condamne les abus qui ont été documentés par la Rapporteuse Spéciale sur la situation des droits de l’homme en Érythrée ;
  • renouvelle le mandat de la Rapporteuse Spéciale;
  • exhorte au gouvernement d’Érythrée de permettre les mécanismes spéciaux du Conseil des droits de l’homme de l’ONU et de la Commission Africaine des Droits Humains et des Peuples de pouvoir accéder le pays.

Nous vous prions d’accepter l’expression de nos sentiments les plus respectueux, et nous vous remercions  pour votre attention face à ces préoccupations. Nous restons à votre disposition pour de plus amples informations.

Sincèrement,

African Centre for Democracy and Human Rights Studies

Amnesty International

Article 19

Cairo Institute for Human Rights Studies

Christian Solidarity Worldwide

CIVICUS

East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project

Egyptian Initiative for Personal Rights

Human Rights Concern – Eritrea

Human Rights House Foundation

Human Rights Watch

International Service for Human Rights

Reporters Without Borders

Strategic Initiative for Women in the Horn of Africa

West African Human Rights Defenders Network

 

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